Mentoring en entreprise 9/10

La mise en relation du binôme

Voici dans la série sur le mentoring le 9ème article qui comme annoncé précédemment, traitera du “matching” des membres du binôme de mentoring. C’est un sujet délicat car il n’existe pas de recette magique pour le faire, et il est crucial pour la réussite de la relation. Nous allons donc explorer ici quelques points importants issus de la recherche et des meilleures pratiques.

Le processus de mise en relation

Nous commencerons par aborder le processus lui même d’appariement. Plusieurs pratiques existent : l’institution fait le matching, le mentee choisit son mentor dans une liste, des “blind dates” sont organisées, ou du “speed meeting” (copiant ici les pratiques des agences de rencontres), etc. Parmi toutes ces pratiques nous avons trouvé qu’un choix mutuel est important plutôt que d’imposer l’appariement. De plus pour que ce choix se fasse, une rencontre préalable sans engagement est importante afin que les participants puissent commencer à se découvrir, se trouver des points communs et des potentiels synergies ou bénéfices à leur collaboration.

Le cas échéant, un auto-matching peut se faire directement par les participants en utilisant des bases de données de profils. Il faudra ensuite trouver des mentors ou mentees pour les personnes ne trouvant pas de match direct.

L’institution ou organisateur du programme de mentoring peut aussi faire cet appariement basé sur des critères variés :

  • Les objectifs du programme (trans-national, trans-fonctionnel, trans-genre, trans-culturel, etc.) ;
  • Les besoins des mentees (développement de carrière, développement de compétences spécifiques, développement de business etc.) ;
  • Le format du programme (face-à-face ou virtuel).

Dans tous les cas, le processus d’appariement doit être transparent, afin que les participants comprennent pourquoi ils ont été mis en relation avec une personne particulière. J’ai pu observer certaines frustrations de la part de mentees lorsque ce n’était pas le cas.

Les critères de choix

Lorsque j’ai interrogé des mentors et mentees d’un programme de mentoring d’entrepreneurs, les critères suivants ont été mentionnés :

  • La similarité

Dans le cas d’entrepreneur, la similarité est très importante pour créer une compréhension mutuelle. Elle est surtout focalisée sur le secteur et le métier des entrepreneurs.

  • La complémentarité

Pour s’engager dans une relation de mentoring les participants ont besoin de savoir si celle-ci sera fructueuse, donc si les membres du binôme peuvent s’apporter des compétences, des connaissances, des idées, etc. La plupart des mentees mentionnent le choix d’un mentor en fonction des expériences ou compétences spécifiques que le mentor peut avoir (finance, marketing, management etc.). Du côté des mentors, ils doivent sentir qu’ils pourront être utiles et donc la complémentarité est importante de leur point de vue également.

  • Le feeling

Ce critère de choix est le plus inexplicable, c’est l’aspect relation humaine. Les participants mentionnent souvent l’idée de “courant qui passe ou ne passe pas”. Cette attraction a trois aspects : la sympathie et l’attraction physique, la similarité et l’appartenance au même groupe social.

  • La proximité géographique

Pour des raisons purement pratiques, facilitant la rencontre face-à-face, la proximité géographique dans notre cas est très importante. La vie d’un entrepreneur étant très occupée, la distance géographique peut être une barrière forte à la rencontre et peut mener au manque de disponibilité des participants et éventuellement à l’échec de la relation.

Je voudrais souligner un dernier point sur les critères de choix spécifiques aux mentors : ils seront attirés à la fois par le mentee-entrepreneur (l’aspect “feeling” mentionné plus haut) et par le projet-entreprise du mentee (son potentiel, son intérêt, etc). Il est donc important qu’ils puissent découvrir à la fois la personne et son projet.

Le rôle de l’institution

Dans ce processus de mise en relation des membres du binôme de mentoring, les meilleures pratiques suggèrent qu’il faille :

  • Réduire l’asymétrie d’information

L’institution est au départ le seul lien entre les mentors et les mentees, et possède des informations sur les individus de chaque groupe. Pour favoriser la mise en relation, il faut réduire cette asymétrie, informer les mentors sur les mentees et leur projet, informer les mentees sur les mentors et leur profil. Sachant que la formation préalable devra aussi aider les mentees à identifier leurs besoins en mentoring pour mieux cibler les mentors potentiels.

  • Encourager les “matches” naturels

En organisant des rencontres préalables sans engagement, pour laisser les participants se “trouver”.

  • Un bon mix de similarité et complémentarité

Lorsque l’on doit apparier les participants, il est important de ne pas se contenter d’utiliser la similarité comme critère de choix. Le développement par le mentoring dépend beaucoup des apports mutuels et donc d’une certaine différence d’expérience, de compétence, de parcours etc.

  • Une période d’essai

Pour des raisons de facilité il est peu courant d’utiliser la période d’essai car elle implique la possibilité que la relation ne marche pas et qu’il faille re-matcher les membres du binôme avec d’autres personnes. Cependant, une période de 2-3 mois d’essai permet à la relation de se développer (surtout pour les binômes appariés par l’institution) ou pas, et si elle ne fonctionne pas de rapidement reformer de nouveaux binômes et éviter les frustrations et déceptions.

  • Un processus de séparation polie

La période d’essai implique la possibilité d’une séparation sans conséquences. De plus toutes les relations n’ont pas la même durée de vie et peuvent s’essoufler avant d’arriver à terme (selon le format du programme). Il est important que le processus de séparation polie soit clair, et défini dès le début du programme.