Doit-on récompenser les mentors pour leur contribution au développement des futurs talents de l’entreprise et entrepreneurs ?

Dans les entreprises pratiquant le mentoring (en interne) il est rare que les mentors soient récompensés financièrement. Dans leurs études de cas  Klauss (1981) ainsi que Clutterbuck & Meggison (1999) trouvent que les récompenses financières sont très rares ce qui est souvent justifié par le fait que le mentoring fait partie de leur job, ce qui est souvent implicite et parfois explicite lorsque  mentionné dans leurs objectifs.


Les mentors reçoivent plutôt des récompenses personnelles (satisfaction d’aider l’autre, amitié, rajeunissement) ou de développement personnel au travers d’un  apprentissage par l’autre (stimulation intellectuelle, connexion à de nouveaux modes de pensées, compréhension de ce qui se passe dans certaines parties de l’organisation, challenges de leurs idées etc.) ou de retour pour l’organisation (engagement des jeunes, successeurs avec vision stratégique, climat d’échanges inter-générationnels, inter-hiérarchiques et transversaux).

Lorsque l’éventualité de payer un mentor est abordée, les avis sont partagés entre le fort besoin de reconnaître d’une certaine façon la contribution du mentor au développement des futurs talents de l’entreprise et le biais que peut poser cette rémunération dans la relation entre le mentor et son mentoré. Pour faire confiance à son mentor, une personne mentorée a besoin de connaître les motivations de celui-ci, si celles-ci sont financières cela change la relation d’aide vers une relation client-fournisseur.

Lorsque l’on aborde le mentoring inter-entreprise, la question de récompense est ambigüe. En effet, une rémunération impliquerait une relation professionnelle commerciale et non pas une relation d’aide et d’accompagnement. Cependant dans un effort de reconnaître et récompenser les personnes accompagnant des entrepreneurs ou repreneurs d’entreprise, le gouvernement français a émis une nouvelle directive (Bulletin Officiel des Impôts du 4 janvier 2010) donnant droit aux accompagnateurs (sous certaines conditions) à un crédit d’impôts de 1000€ par personne accompagnée.

A la suite de la publication de cette directive, le Pays d’Aix Initiatives parrainant des créateurs d’entreprise dans la région, a considéré l’option et l’a très vite rejetée. En effet, ils ne souhaitaient pas que les accompagnateurs rejoignent le réseau pour des raisons économiques, ce qui irait à l’encontre des valeurs de l’association.

En parlant de valeurs fortes dans le mentoring, le Réseau Entreprendre est un très bon exemple de mentoring réussi. Les membres de l’association contribuent de manière significative dans le financement de l’association et donc des entrepreneurs accompagnés. De plus ils donnent de leur temps bénévolement pour l’accompagnement. Ils ne reçoivent aucune récompense économique, d’ailleurs leur charte éthique reflète des valeurs fortes telles que la gratuité, l’humain et la réciprocité. Le Réseau Entreprendre, fondé par des entrepreneurs, donne un cadre éthique fort aux relations de mentoring qu’il crée.

Il est donc important de comprendre que les mentors ont besoin d’être reconnus, mais pas forcément de manière économique, vu que leurs motivations principales sont intrinsèques, qu’elles soient purement altruistes (besoin d’aider l’autre), sociétales (contribuer au développement de la société) ou personnelles (satisfaction et reconnaissance).

Références :

Direction Générale des Finances Publiques (2010), Bulletin Officiel des Impôts, n°1 du 4 janvier 2010.

David Clutterbuck and David Meggison (1999) Mentoring executives & directors, Elsevier Butterworth-Heinemann.

Rudi Klauss (1981), Formalized mentor relationships for management and executive development programs in the federal government, Public Administration Review, July/August.

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